
[prepas.org] - Vous êtes le directeur de la formation et de la recherche de la nouvelle ENSTA, fruit de la fusion entre ENSTA Paris et ENSTA Bretagne : pouvez-vous présenter l’école, ses spécificités dans le paysage des grandes écoles françaises et préciser ce que la fusion a éventuellement changé vis-à-vis de l’ADN de l’école ?
[Thomas Loiseleux] - L’ENSTA, c’est d’abord près de trois siècles d’histoire puisque nous sommes la plus ancienne école d’ingénieurs de France et que nous trouvons notre origine dans la construction de navires pour la marine royale. Nous avons bien sûr fait beaucoup de chemin depuis le temps de la marine à voile puisque nous proposons aujourd’hui 18 voies de spécialisation en troisième année du cycle ingénieur généraliste, dont un bon nombre dans des secteurs mettant en œuvre des technologies de rupture.
Si je voulais synthétiser cela, je dirais que sur nos deux campus de Paris-Saclay et de Brest, nous préparons nos futurs diplômés, grâce à des enseignements nourris par une recherche de premier plan, à concevoir des solutions innovantes et durables face aux grands enjeux de notre époque, en particulier dans les secteurs de souveraineté : l’énergie, la mer, les transports et mobilités, le numérique, la santé et la défense.
Autre particularité de la nouvelle ENSTA, le fait qu’elle soit un des membres fondateurs de l’Institut Polytechnique de Paris, ce qui permet de démultiplier les possibilités à la fois de recherche et de formation par l’interdisciplinarité avec les autres grandes écoles de l’Institut. C’est un véritable atout de pouvoir offrir un si grand nombre de doubles diplômes avec les masters proposés par les autres écoles de l’Institut, qui sont je le rappelle l’École polytechnique, l’École nationale des ponts et chaussées, l’ENSAE, Télécom Paris et Télécom SudParis.
Concernant « l’ADN de l’École » pour reprendre votre expression, je ne dirai pas qu’il a changé, mais qu’il s’est renforcé par rapport à ce que les écoles dont la nouvelle ENSTA est issue proposaient indépendamment :
Et je pourrais en dire de même s’agissant de la robotique, de l’ingénierie système, de la défense et sécurité, de l’intelligence artificielle, etc.
[prepas.org] - Quelles sont les nouvelles formations proposées à partir de la rentrée 2026 ? Est-ce que votre offre de formation historique, pour le parcours d’ingénieur généraliste, a évolué du fait de la fusion ?
[Thomas Loiseleux] - Pour la rentrée 2026, l’ENSTA déploie une toute nouvelle offre de formations. 4 diplômes d’ingénieurs en 3 ans sont proposés, du généraliste aux spécialités en défense, mécanique ou systèmes embarqués, pour préparer des ingénieurs ayant des profils différents pour répondre à une variété de besoins des entreprises, mais ayant des caractéristiques communes, par exemple l’attention marquée pour le sujet de la souveraineté ou encore la capacité à répondre aux grands enjeux industriels et technologiques de demain.

Notre parcours d’ingénieur généraliste reste pour l’essentiel fidèle aux fondamentaux qui ont fait sa réputation et nous valent de figurer aux premiers rangs des classements, mais
[prepas.org] - Comment s’organise la répartition des différents enseignements sur les deux campus ? Les étudiants peuvent-ils choisir sur quel campus ils souhaitent étudier le socle commun ?
[Thomas Loiseleux] - Cela dépend en grande partie du diplôme préparé, et au sein de la formation généraliste, de la spécialisation de troisième année recherchée. Dans le détail, ça donne :
- Diplôme d’ingénieur généraliste
- Diplôme d’ingénieur Défense et Sécurité Cette formation accessible par le concours Mines-Telecom a pour objectif de former des ingénieurs pluridisciplinaires de haut niveau, civils et militaires, pour les grands domaines de souveraineté nationale : cyber, IA, naval, terrestre, aéronautique et espace. Elle expose ses élèves à un univers unique où se conjuguent hautes technologies, innovations de rupture et enjeux stratégiques. Hautement qualifiés, les ingénieurs issus de cette formation seront appréciés pour leur capacité à concevoir, développer et piloter les systèmes les plus complexes.
- Deux diplômes d’ingénieurs de spécialité par alternance : systèmes embarqués et mécanique Ces formations sont délivrées par apprentissage sur le campus de Brest, après admission sur dossier après bac+2/3, BUT2 et BUT3, CPGE, BTS et prépa ATS, L2 ou L3 en sciences et technologies.
La formation d’ingénieur généraliste, accessible principalement par le Concours commun Mines-Ponts, est délivrée indifféremment sur les deux campus de Paris-Saclay et de Brest pour la première année, et selon les choix d’approfondissement et de spécialisation pour les deux années suivantes. Les spécialisations de troisième année se répartissent comme suit :
Campus de Paris-Saclay : énergies durables, nucléaire, cybersécurité, Intelligence artificielle, ingénierie des systèmes complexes, sciences de l’optimisation et des données, modélisation et simulation, ingénierie et mathématiques pour la santé, finance quantitative, mécanique des fluides numérique.
Campus de Brest : systèmes pyrotechniques et propulsion, génie maritime, énergies et mer, hydrographie et océanographie, systèmes d’observation et traitements intelligents, modélisation avancée des matériaux et des structures.
Campus de Paris-Saclay et de Brest : mobilité durable, robotique et systèmes autonomes.
Délivrée conjointement par l’ENSTA et l’ISAE-SUPAERO, une grande première en France qui donne l’opportunité de rejoindre simultanément les deux communautés d’alumnis, cette formation hérite du savoir-faire des deux écoles en formation d’ingénieur et recherche. Réputées pour leur excellence et leurs liens historiques avec le secteur de la défense et les domaines d’application les plus innovants, les deux écoles disposent de communautés d’anciens élèves solidement implantées dans tous les domaines de l’ingénierie.
Première année : toute la promotion est réunie sur le campus de Brest, permettant de créer des liens forts entre tous.
Deuxième année : les étudiants rejoignent le campus de l’option de spécialisation choisie : cyber et IA à l’ENSTA, campus de Paris-Saclay, naval et terrestre à l’ENSTA, campus de Brest, aéronautique et espace à l’ISAE-SUPAERO, campus de Toulouse.
La spécialité « systèmes embarqués » permet de maîtriser le double aspect matériel et logiciel du système embarqué. Les enseignements portent sur les méthodes de programmation pour l’embarqué temps réel et le calcul intensif, la conception d’une intelligence artificielle, les mécanismes de la radio-logicielle et des réseaux de capteurs... De nombreux projets complètent la formation.
La spécialité « mécanique » forme des ingénieurs en conception de systèmes mécaniques dans le domaine de l'architecture navale ou des systèmes pyrotechniques.
[prepas.org] - Vous venez de nous apprendre qu’un nouveau diplôme conjoint avec Supaéro fait partie de la nouvelle offre de formation. Pouvez-vous détailler les partenariats existants entre l’ENSTA et d’autres grandes écoles françaises ?
[Thomas Loiseleux] - Bien sûr, en espérant que l’énumération ne sera pas trop fastidieuse :
Double diplôme d’ingénieur avec l’École navale, l’INSTN ou l’IFP School.
Comme évoqué en réponse à votre première question, doubles diplômes avec de nombreux masters des écoles de l’Institut Polytechnique de Paris, que ce soit sur le campus de Paris-Saclay ou de Brest
Je mentionnerai également notre double diplôme avec HEC, où nos élèves s’épanouissent particulièrement du fait de la formation très généraliste de notre tronc commun de première année.
Nous avons en outre des partenariats structurants pour certaines de nos spécialisations de dernière année avec l’École polytechnique, Télécom Paris, et l’ENSAE.
Enfin, des partenariats existent avec de nombreuses écoles en France dont l’ISAE-SUPAERO pour de la mobilité en 3e année, afin de suivre une spécialisation qui n’est pas offerte à l’école et qui respecte le positionnement scientifique et technique de nos formations. Le détail est accessible sur notre site Internet ENSTA.fr.
[prepas.org] - La mobilité internationale est-elle encouragée dans le cursus d’un étudiant de l’ENSTA ?
[Thomas Loiseleux] - La mobilité internationale reste en effet un élément essentiel de la formation des ingénieurs de l’ENSTA.
La durée de ce semestre varie en fonction des formations, qu’elles soient sous statut étudiant ou par apprentissage.
Il est possible de substituer un semestre ou la troisième année du cursus, ou encore effectuer des stages à l’international. Une année de césure à l’international, hors cursus, est également possible, que ce soit en entreprise, en laboratoire ou dans un établissement académique.
Cette expérience à l’international est particulièrement appréciée par nos élèves ingénieurs. Elle représente une occasion unique d’acquérir les compétences internationales indispensables aux ingénieurs de demain, de découvrir un nouveau pays, une culture différente, d’autres modes de fonctionnement, tout en poursuivant les apprentissages dans un environnement différent.
En outre, la substitution de la troisième année permet d’obtenir un double diplôme. En janvier 2025, nous comptions près de 120 étudiants en double diplôme dans les universités scientifiques les plus prestigieuses (Politecnico di Milano, Polytechnique Montréal, KTH, DTU, NUS, etc.)
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